Et si on jouait au bilboquet avec les licornes ? Pour Jung, l'homme qui part à la découverte de son âme, c'est un peu comme Jonas qui se fait bouffer par la baleine. Au début, il se dit DAMNED, j'aurais mieux fait de rester tranquille, et il morfle. Il paraît que c'est nécessaire. Depuis que le christianisme s'est instauré avec son homme sur la croix, on imagine toujours qu'il faut qu'il y ait quelque chose qui paie pour le bonheur (enfin, c'est approximatif) du reste.
« On ne se sent pas tout à fait à son aise tant qu'on ne s'est pas rencontré avec soi-même, tant qu'on ne s'est pas heurté à soi-même ; si l'on n'a pas été en butte à des difficultés intérieures, on demeure à sa propre surface ; lorsqu'un être entre en collision avec lui-même, il en éprouve, après-coup, une impression salutaire qui lui procure du bien-être. »
Si vous lisez bien vous comprendrez qu'en fait, la baleine n'est pas une baleine, ce qui s'explique très naturellement par le petit guide des projections appliquées, que vous trouverez également à l'intérieur de l'ouvrage. On parle en langage symbolique bordel, décollez de terre cinq minutes voulez-vous.
« Ou nous connaissons notre ombre ou nous ne la connaissons pas ; dans ce dernier cas, nous avons fréquemment un ennemi personnel sur lequel nous projetons notre ombre, dont nous le chargeons gratuitement, qui la détient à nos yeux comme si c'était la sienne, et auquel en incombe l'entière responsabilité […] »
On peut tuer le monstre avant de s'être laissé bouffer par lui, et on est content. Enfin, bof. le mieux, comme l'avait dit Jonas, c'est quand même de se laisser bouffer par le monstre et de le trucider de l'intérieur, après être remonté le long de sa caverne pleine de remugles.
« Lorsque le personnage englouti est un héros authentique, il parvient jusque dans l'estomac du monstre [...]. Là, il s'efforce, avec les débris de son esquif, de rompre les parois stomacales. […] Puis, il allume un feu dans l'intérieur du monstre et cherche à atteindre un organe vital, le coeur ou le foie, qu'il tranche de son épée. […] Il ne quitte pas seul la baleine, à l'intérieur de laquelle il a retrouvé ses parents décédés, ses esprits ancestraux, et aussi les troupeaux qui étaient le bien de sa famille. le héros les ramène tous à la lumière ; c'est pour tous un rétablissement, un renouvellement parfait de la nature »
C'est que le Jonas n'avait pas oublié la part de crevette qui dormait en lui dans la partie sympathique de son système nerveux, en cohabitation pacifique avec le saurien de la moelle épinière. Mais parce que la plupart d'entre nous ne vit que dans la couche supérieure de sa psyché, nous sommes « tels des êtres pétris seulement de conscience, ressemblant à ces angelots dont la corporalité est réduite à une tête et à deux ailes, comme si le restant de notre corps et de notre organisme psychique était inexistant, alors qu'en réalité il est seulement tabou ».
Ce que Jung veut dire, c'est que c'est pas la peine d'aller vraiment se faire buter par une baleine ou par un dragon. On peut communiquer avec la part inconsciente de son âme en observant les rêves, en analysant les phénomènes d'association, ou plein d'autres trucs encore qui seront précisés ici. le mal comme le bien seront intégrés afin de redevenir enfant, pas comme le trentenaire mal dégrossi qui se pose devant ses séries tous les soirs avec des fraises tagadas. Celui-là ne fait qu'attendre son heure, c'est tout.
« L'être, en grandissant, oublie le secret de la totalité enfantine, de l'enfant qui sait laisser vivre en lui tout un monde sans le paralyser de réflexions, de jugements, de condamnations »Jung « L'Homme à la découverte de son âme »
[Source : psychanalyse jungienne (FB)]