|
Auteur | Message |
---|
cheliel
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 12:22 | |
| Je ne comprenais pas quel était le sens de cette quête qui m’était dévolue. Je suivis cependant le gnome qui dandinait joyeusement et d’un pas lent, je marchai aux côtés de mon ami quadrupède. Altair paraissait serein et avançait de son propre chef, à la suite du farceur. Muni d’une lanterne, le petit génie éclairait notre route, mais mon esprit restait opaque et mon cœur confiant ne possédait aucune réponse qui puisse satisfaire ma curiosité.
Les explications avaient manqué et si l’on me mettait à l’épreuve, j’ignorais le sens et les buts de cet exercice. Pouvais-je me détourner des sombres lacis terreux qui serpentaient dans les mystères nocturnes de la forêt, alors même que mon cheval s’accommodait des énigmes pour suivre cette créature facétieuse qui nous avait accueillis en rhume simulé ?
— Lilo...
Le nain s’arrêta et Altair l’imita. Tous deux m’observèrent comme si ma tentative de dialogue était insensée. Il me fut étrange de voir mon fidèle compagnon équin se fier aux comportements du gnome et plus troublé encore, j’insistai pour avoir des explications.
— Où allons-nous et quel objectif servons-nous. Je suis venu à votre rencontre comme si j’évoluais dans un rêve, mais tout me paraît soudainement absurde et dénué de sens.
Altair souffla comme seuls les chevaux savent le faire et notre guide lui caressa doucement le flan avant de se poster devant moi, son regard étrange voilé de sévérité.
— Les humains veulent toujours chercher des raisons à tout, mais ils n’écoutent pas les murmures de la magie qui les entoure. La forêt vous a choisi Ildarion Lancedor, et le peuple qui y vit sert les forces bénéfiques de la nature. Le sens de votre quête vous apparaîtra seulement si votre âme est assez magnanime et courageuse pour passer le seuil des douze maisons. Si vous êtes bel et bien le champion dont la lumière a besoin, alors vous devez apprendre par vous-même à lire les signes. Allons maintenant, la première maison nous attend, votre élan en son sein définira tout le reste, soyez donc attentif.
— Mais Cléophée, intervins-je, avant d’être interrompu subitement.
Lilo Boisjoli parut s’agacer et je me retrouvai sans voix. L’austérité du ton qu'il employa était si éloignée des espiègles mélodies qu'il m'avait réservé plus tôt.
— La gardienne de la septième maison accueille, son baiser protège, mais elle vous mettra à l’épreuve si vous parvenez jusqu’à elle. L’ordre des choses n’est pas capricieux, c’est celui qui cherche à sauter les étapes qui se perd dans ce défaut.
Le petit homme difforme se détourna de moi et reprit sa progression, sa lanterne éclairant ses petits pas pressés. Altair n’attendit pas de signal pour le suivre et je me retrouvai à leur emboîter le pas, perplexe et déboussolé. Pareil à un enfant qui s’éveille aux mystères de la vie, j’avançai, aussi candide que peut l’être celui qui ignore tout. |
| | | Poqueline
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 13:30 | |
| Le chemin me parut interminable, d’autant que le rabougri depuis l’evocation de Cleophée était devenu taciturne. Il ne se préoccupait que de mon canasson, le flattant, lui caressant sa crinière, lui glissant de sa poche des morceaux de pomme ou de pain. Marchant derrière eux, je me sentais rapetisser, perdre de taille, d’importance même et surtout de ma fière allure d’ecuyer dont jusqu’alors je pouvais me vanter Par contre, au fur et à mesure que nous progressions, mes pieds s’agrandissaient étrangement déchirant le cuir de mes bottes pourtant si souples. |
| | | julienastro
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 17:10 | |
| la huitième? c est ou ca je suis perdu maintenant, on m avait dit au 3 ème chêne a gauche ,tu suis le sentier du sanglier a travers la ronce (N.B: aller chez le couturier refaire ma tenue) tu sautes dans le trou , c est malin je suis pleine de boue et mon fidele destrier qui se fou de moi maintenant ... |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 18:01 | |
| "Ha ha ha ha!!!" un grand rire joyeux résonnait maintenant dans ma tête. _ Ildarion, je t'avais prévenu de ne pas fumer la moquette ! En ces temps de chrysalide, les effluves de frousse humaines ont tendance à squatter les neurones ! Je reconnu la voix de clochette de Cléophée, regardais mes pieds soudain redevenus à leur taille normale, pendant que Lilo et Altair me regardaient goguenards. Mais déjà, la lampe de Lilo commençait à éclairer au-delà des ramures des arbres, une clairière sombre où une petite maison laissait passer de la lumière à ses fenêtres. _Allez Ildarion, reprends-toi, me souffla Lilo. Nous allons bientôt arriver à la première maison. Prépare-toi, le gardien nous y attend. D'un pas tranquille nous avançâmes vers la masure qui me parut de plus en plus grande. Je me sentais mieux, entouré de mes deux compères au pas décidé. Je conservais en mon cœur le souvenir de la lumière, comme une étincelle de courage et m'avançais maintenant, avec une soif de découverte vers mon premier mystère à résoudre... |
| | | SinceKid
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 22:35 | |
| C'était une maisonnette lugubre qui quand on s'approchais tout prait, faisait passer des idées noires, d'abord je restais circonspecte et soudain, alors arrivé au seuil de la porte, elle s'ouvris toute seul. Mais qu'est-ce qui pouvais avoir de si terrible dans cette maisonnette? mon coeur ne tardas pas à le savoir. |
| | | Blou
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Jeu 2 Avr 2020 - 23:52 | |
| la clarté revint et je vis un homme à l'allure athlétique, inondé de lumière. Ceinturé d'un pagne blanc, il avait des muscles saillants, une peau légèrement ambrée et tout le corps luisant de son labeur. À demi nu, il activait un brasier énorme. Autour de lui, c'était l'effervescence, tout était en mouvement, les poules piaillaient, les chiens hurlaient et dans l'air ambiant, on devinait que la nature avait chassé le froid et les gelées. Les fleurs et les arbres avaient de jeunes feuilles et les oiseaux chantaient à tue tête. c'était le printemps ! (love is in the air) et sans m'en rendre compte, je repris la chansonnette en m'avançant vers lui |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 10:59 | |
| Je m'écris en cet havre exquis...
L'homme se figea devant le feu incandescent qu'il semblait nourrir depuis la nuit des temps. Un temps mort dans le magnifique tableau d'une vie brûlante, d'une force de la nature. Voilà ce que ma misérable présence avait créé dans cette maisonnette. Voilà ce que ma voix incertaine avait tracé au milieu du mouvement naturel. Un silence. Un trouble. Je m'écris en cet havre exquis ? Quel yaourt ! On ne savait vraiment plus quoi inventer. Et que venais-je chercher ici ? Quels esprits tordus s'accordaient sur un devenir dont je ne saisissais pas moi-même les ressorts ? Un cri en silence... Devais-je continuer ou cesser cette rengaine insensée qui me vrillait en dedans et à tue-tête depuis que j'avais baigné dans les lumières enchanteresses du lac, véritable havre de paix ?
À ce souvenir, mon attention se dirigea vers celle que j'avais tantôt sentie en moi, fragile, douce, mais bel et bien présente. Et venant trancher dans les contractions mentales, elle m'intima de m'abandonner à la suite de la mélodie.
d'un monde à l'autre, d'un moi à l'antre...
Et je me figeai, bousculé par la résonance intérieure de ces paroles qui n'étaient pas en l'air. La lumière redoubla d'intensité tandis que je prenais une violente inspiration, celle des êtres trop longtemps en apnée dans leurs illusions. L'homme releva les yeux vers moi, essuya les gouttes de sueur qui perlaient sur son front avant de prononcer ces quelques mots, un sourire entendu au coin des lèvres :
_ Joli cri... Bienvenue au monde.
Dernière édition par Navane le Ven 3 Avr 2020 - 11:49, édité 2 fois |
| | | cheliel
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 11:33 | |
| J’étais enfin né, une nuit étrange, devant la cabane d’un homme qui accueillait l’arrivée d’un gnome, d’une monture et de son cavalier. J’étais né à la magie qui s’insinuait désormais en mes chairs comme l’air s’infiltre pour la première fois, dans les poumons du nourrisson qui sort du ventre de sa mère.
Après m’être écrit dans les lignes de mon cœur assommé d’incompris, après avoir déversé ma prose dans mes veines engourdies, je m’écriais dans les ombres du monde pour en saisir la lumière cachée, en abreuver mon être assoiffé d'envies.
À genoux dans la terre meuble qui bordait la lisière d’un Nouveau Monde en naissance pour mes perceptions enflammées, je donnais le spectacle de mon éveil au fantastique. Essoufflé, je relevai la tête et vis l’homme torse nu qui souriait comme peut le faire une sage-femme qui tient un nouveau-né. Il était troublant de m’imaginer que cet étranger avait aidé à accoucher la magie qui dormait en moi.
Il était beau, mais ce n’était pas son apparence qui le rendait ainsi. Une lumière flamboyante auréolait son être, une aura puissante et stable alors qu’il marchait vers moi. Je tournai la tête vers Altair, toujours à mes côtés. Mon fidèle destrier était dans une position de révérence et je compris que son cri chevalin s’était accordé au mien. Lui aussi était né cette nuit et son front arborait la marque d’une petite corne en devenir, tandis que l’argent s’épanouissant dans la lumière qui émanait de lui en volutes dansantes.
Amical et bienveillant, l’homme souriait et me tendit sa main puissante, sûre.
— Neven Beauprintemps, se présenta-t-il, un sourire fier plaqué sur son visage masculin.
Je saisis sa paluche et il me tracta vers lui pour que je retrouve ma droiture. Quand ce fut le cas, il rit généreusement et tapa affectueusement mes épaules. J’étais sonné, mais je ne pouvais pas empêcher mon propre rire de s’harmoniser sur le sien. Tant de nouvelles sensations me brouillaient les entrailles d'espoirs inédits. De son côté, Lilo le gnome s’occupait de caresser Altair qui se redressa et s’ébroua joyeusement.
Dernière édition par cheliel le Ven 3 Avr 2020 - 11:40, édité 1 fois |
| | | Poqueline
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 11:40 | |
| Émanait de lui une puissance sereine qui m'enveloppait. Il me fit signe de le suivre, ce que je fis instantanément, comme aimanté. Dans la pièce attenante, était une robuste table de chêne, une sorte d'établi très ancien sur laquelle était disposé toute sorte d'objets insolites ou pas : des outils pointus, des bâtons noueux ou savamment sculptés, des vestiges d'animaux, d'étranges amulettes, des ustensiles de cuisine assez simplistes, des gobelets, des dés, des instruments de musique archaïques, un incroyable arsenal. " a toi de choisir tes armes " me dit il |
| | | SinceKid
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 15:48 | |
| Et je fus subjuguer par l'apparition d'un glaive d'argent, mon instinct me guider vers ce glaive, je l'à pris et soudain, un foudroiement ebranla la maisonette et un vieille homme jaillir dans le milieu de la pièce sans mot dire, me communiqua par la pensée que mon heure de vérité etait venu.. |
| | | cheliel
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 18:30 | |
| Surpris par ce changement soudain, je lâchai l’arme et me retrouvai dans la pièce attenante de la maisonnée telle qu’elle avait été avant que je ne me saisisse du glaive. Le calme revint et une sensation impossible à décrire électrisait mes nerfs. Neven me regarda, un sourire goguenard sur son visage avenant, une moquerie légère en réponse à ma stupeur.
— Tu as vu l’esprit de l’arme, n’est-ce pas ? demanda-t-il alors qu’il me montrait tous les objets qui s’amoncelaient sur l’établi.
J’acquiesçai et regardai son geste, m’apercevant que ses mains étaient celle d’un homme qui sait s’en servir pour construire et réparer. « Un accoucheur de rêves » me murmura la magie qui s’épandait en moi.
— Chaque objet étalé ici est pourvu de sa propre étincelle, Ildarion. Choisis avec précaution celui qui fait échos à tes propres potentiels et non celui qui t’attire parce qu’il t’évoque quelque chose de connu. Tu as déjà une très bonne épée, fidèle et serviable. Tu lui insuffleras ta propre magie, le caractère que tu veux lui donner. Le glaive que tu viens de reposer demande la sagesse d’un vieillard pour être manié sans faire déferler l’injustice par manque de maîtrise ou par erreur.
Les paroles de Neven résonnèrent en moi et je ne savais plus. Lilo dont j’avais oublié la présence se manifesta en poussant le maître des lieux d’un air contrarié. Il posa sa lanterne sur la grande table et mis un petit coup de pied dans la cheville de son comparse qui ne bougea pas.
— N’influence pas son élan dans la magie, s’il doit se brûler les doigts pour apprendre, laisse-lui subir les conséquences de ses choix inconsidérés. C’est son initiation, non la tienne.
Le gnome était strict et sa voix pincharde agacée, mais lorsque le gardien de la première maison baissa la tête pour lui réserver un sourire amène, il ne put s’empêcher de ricaner joyeusement. J’eus l’impression qu’ils partageaient une connivence dont j’étais exclu et je redirigeai mon attention sur les petits objets qui narguaient ma vue. L’indécision me gagnait et je ne savais que choisir.
Je pris une inspiration, fermai les yeux et laissai ma main passer aveuglément sur l’étale de bric et de brocs qu’on me présentait. Soudain, je ressentis un petit picotement de plaisir dans le cœur de ma paume et me saisis de l’objet qui m’évoquait cette étrange compatibilité. |
| | | Blou
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 18:58 | |
| il tenait dans la paume de ma main, c'était un sachet en toile de jute grossièrement taillé mais enrubannée d'un cordon doré. A l'intérieur quelques graines...... de la terre et même un peu de foin. |
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 3 Avr 2020 - 19:29 | |
| Au milieu du foin, je sentis la présence d'un petit objet.
Il était dur au toucher, un peu froid et assez lisse. Je le sortis du sachet et, débarrassé du foin, vis un petit galet de pierre avec un étrange dessin gravé dessus, comme deux X l'un au-dessus de l'autre.
Je regardais Neven et Lilo d'un air interrogateur, dans mon ignorance de l'utilité de cet objet inconnu, qui pourtant semblait rayonner une énergie douce et forte dans ma main.
Leurs regards s'allumèrent et comme un seul homme ils s'écrièrent : "Bon choix!"
_Nous te félicitons, dit Neven, tu viens de te concilier la magie d'Ingwaz, la rune du Dieu Freyr, un de nos grands amis et protecteur de notre forêt magique...
_ Oui, poursuivit Lilo, Freyr commande la pluie et l'éclat du soleil et sa bénédiction rayonne sur les fruits de la Terre. Il est bon de l'invoquer pour la prospérité et pour la paix chez les hommes et tous les êtres vivants sur Terre.
D'ailleurs, sa couleur est le vert, il porte en lui la vertu d'harmonie et d'accomplissement. Sa rune est un cadeau précieux qui t'accompagnera dans la poursuite de ta quête.
Je sentais le petit galet peser légèrement dans ma main, et le dessin peu à peu commença à dégager une douce lumière verte qui se projeta sur les murs de la maison. Tout le petit monde de la maison s'arrêta et se laissa baigner par la lumière en riant de bonheur. Altair devint comme fou et hennit comme jamais, et tous se mirent à chanter et danser en ronde.
Moi-même fut pris d'une joie qui souleva mes pieds, et repris ma chanson...
A l'ombre tremblante des sept noyers, Je commence, tu termines, tout ce que tu souhaites effeuiller, chaque fois, qu'en levant son vers d'origine, le lutin sifflera "le rire fée d'air" pour les écureuils fadas, lalalalère
|
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Sam 4 Avr 2020 - 18:34 | |
| Nos rires nous reliaient dans cet havre enchanteresse. Ils se gorgeaient les uns des autres dans une contagion éclatante qui pourfendait les lois de la gravité. Ils les déstabilisaient jusqu'à s'élever plus haut que les mondes rocambolesques traversés pour enfin mêler leur pureté à celle du ciel. Nos rires, des petits soleils qui rafraîchissaient nos âmes, une avalanche d'étoiles qui nous ramenait sur terre. Les pieds bien ancrés à la vie.
Nous reprenions nos souffles dans cette cabane, plus riches de cet instant de complicité fortuite... L'ignorance qui avait été la mienne m’apparut alors en pleine face. Je me trouvais bien ridicule de mettre recroquevillé sous le poids de creuses interrogations, aveugle et sourd au monde que je portais en moi, et celui qui m'entourait. A tous les univers qui constellaient l'existence.
Je regardais Neven, l'homme qui m'avait révélé les charmes de la rune et à moi-même en ravivant la flamme qui palpitait en mon sein. Ce bon vieux guide, Lilo, dont le corps difforme était encore secoué par les spasmes gracieux du moment, et Altaïr fidèle compagnon de vie plus lumineux que jamais de cet atour qu'il arborait fièrement... Oui, j'étais plus riche de la magie, de ce que j'avais appris, de mes erreurs, de mes virages et surtout de ces visages. Qu'ils étaient beaux. Nous n'étions qu'un instant. Nous ne serions jamais qu'un instant. Mais quel instant nous venions de partager ! Toujours restera inscrite en moi l'image d'Altaïr en vol plané, les quatre fers en l'air... Intarissable instant, éternellement.
Tout était déjà là pour qui savait le voir et l'apprécier. Je n'appréciais pas. Non. La Beauté s'imposait. Avec force et nuance qu'elle me laissait à peine le temps de m’inspirer d'elle. Elle s'emparait de moi avec une puissance jusque-là étrangère. C'était presque douloureux tant c'était bon. Transcendant d'inattendu. C'était beau d'être là, d'être ensemble, avec eux. D'être.
Je me sentais plus fort, plus vivant, plus humble de savoir ces êtres écrits sur mon chemin. Tout restait à faire, rien n'était jamais gagné et nombre de mes incompréhensions demeuraient, l'initiation ne faisant que commencer. Pourtant, ces destins arrimés au mien en ébauchaient les sens que je pensais perdus. Nous en avions redessiné les contours, tour à tour. Mon cœur acquiesça à ce sentiment d'un vif battement, prêt à plonger dans l'abîme des jours à-venir.
En étirant largement ses vieux os, Lilo fut le premier à se lever : _ Waw, ça fait un bien fou, dis donc, les amis. Mais, rêve de plaisanterie, tu as une quête à poursuivre, Ildarion. Garde bien cette rune avec toi, et surtout garde toujours foi en sa magie et en la tienne, l'un n'allant pas sans l'autre. Et en avant pour la deuxième maison !
_ Ha, mon ami, à bientôt, je l'espère de tout cœur, ajouta-t-il vers Neven en lui tendant une main qui venait sceller la fin de ce chapitre... Peu importe le héros, peu importe sa quête et le bordel dans sa vie, c'est toujours un bonheur de te retrouver. Je m'excuse tout de même pour le coup asséné mais Ildarion doit faire ses propres expériences. _ Tu avais raison, mon vieil ami, répondit-il en saisissant de sa large main celle du lutin. Ildarion a résisté à l'appel du côté obscur pour finalement choisir l'arme qui lui revenait. Il est en bonne voie, la sienne. J'ai confiance. Tous les possibles se présentent à toi, continua-t-il en s'avançant vers moi alors que Lilo et Altaïr quittaient déjà la cabane.
Je ne savais que lui répondre. Cet homme avait l'étrange pouvoir de me vider de tous mes mots, mes tourments et m'emplir d'infini. Aussi troublant que bienfaisant. Je me ressaisissais. Il m'avait fait le privilège par sa présence de retrouver le fil de la mienne, je devais me montrer digne de ses enseignements, de tout ce qu'il m'avait offert sans me connaître :
_ Je ne te remercierai jamais assez pour ce souffle de vie. Il fait désormais partie de moi et je veillerai à en prendre soin. J'ai encore beaucoup à découvrir. Mais ici, grâce à toi, j'ai renoué avec le fil de la vie. Je me suis senti exister. Tu as fait de moi un homme nouveau.
_ Je n'ai rien fait de particulier. Tu étais prêt. Simplement. Et lorsque le disciple est prêt... Ravi de t'avoir accompagné dans la première étape de ce périple. Je garderai toujours un œil sur toi. Ici, tout se sait, tout se ressent, dit-il en posant sa main sur le cœur.
Dans l'élan du mien, je ne pus m'empêcher de le prendre dans mes bras, reconnaissants et amicaux. Il répondit naturellement à l'étreinte.
_ Lilo doit trépigner à m'attendre, prononçais-je en nous séparant. _ Oh, c'est fort possible. Prépare-toi à prendre une pierre dans la tronche en sortant, pouffa Neven en m'accompagnant vers l'entrée. Il n'est pas toujours commode, c'est sur... Il en a traversé du paysage, des jours et nuits sans jamais perdre son âme d'enfant. C'est un homme juste. Bienveillant, mais pas complaisant.
_ Je n'en doute pas. Encore merci à toi.
_ Belle route, Ildarion, et surveille les signes. Ils te guideront mieux que toutes les boussoles du monde. |
| | | Poqueline
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Sam 4 Avr 2020 - 19:45 | |
| Le sentier que Lilo choisit d’aborder était ourlé de bonne herbe verte, puis on apercevait des pâquerettes, des boutons d’or et d’autres milliers de petites fleurs. Autant la route qui nous avait mené à Neven était rocailleuse et peu agréable, autant celle ci était enchanteresse. Mon rune dans ma poche, je faisais des rêves bucoliques, les narines humant avec délice cette nature luxuriante et printanière. Je me surprenais à sautiller. Nous arrivâmes assez rapidement dans un grand pré où paissait nonchalamment une gigantesque vache immaculée. |
| | | SinceKid
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Sam 4 Avr 2020 - 20:49 | |
| Une matinée printanière s'offrais à moi, dans ses champs verdoyants, Altaïr et Lilo n'en était pas moins patibulaire de tout ce que les puissances célestes nous innondées.
J'avançais, altier et droit à la rencontre des animaux qui peuplé ce champs magique. Entre deux vaches ordinaire ce trouvé un majesteux taureau qui avait l'air placide, je m'avançais donc vers ce brave taureau avec l'espérance de pouvoir m'entretenir avec lui.
Il avait un collier tenant une rune autour de son puissant coup, je savais que je m'etait pas trompé, je devais échanger avec lui.
La première phrase qui pronnoça est "Bienvenu sur nos terre sage, Ildarion". Je m'incliné et lui posé cette question "Est tû le porteur de la première rune de Terre" Il repliqua "Je suis bien le taureau providenciel que ton coeur salutaire ta mis sur ma route". "Prend la rune autour de mon coup et passe ton chemin". |
| | | cheliel
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Dim 5 Avr 2020 - 2:22 | |
| Mais quelque chose n’allait pas, comme une dissonance dans l’atmosphère, la vibration d’une fausse note, qui même dans le silence laisse planer un doute sur l’instant. Un vent tiède balaya le pré qui se situait à la frontière de la forêt. Tandis que je m’apprêtais à saisir le collier à l’encolure du taureau placide, ma main se fit hésitante et je me retournai subrepticement.
Altair n’était pas à mes côtés alors que nous avions vécu la première étape de notre périple ensemble. Lilo quant à lui faisait mine de ne pas s’intéresser à moi, étudiant évasivement les créatures minuscules qui y vivaient leurs épopées d’une autre envergure.
Je pris une inspiration, me laissant guider par l’intuition nouvelle qui prenait vie dans mes sens et je sentis le taureau se crisper alors même qu’il demeurait invariablement statique. Je me reculai d’un pas pour l’observer. Tout cela était trop simple pour être un exercice destiné à me mettre à l’épreuve et me permettre de découvrir cette magie qui était née en moi cette nuit.
— Alors je n’ai qu’à me saisir de la rune qui pend à ton cou, je n’ai rien d’autre à faire ?
Ma voix se fit murmurante et le vigoureux mâle souffla bruyamment. L’animal ne bougea pas, mais j’avais la certitude qu’il se contrariait de ma question.
— Tu me donnes généreusement quelque chose qui ne t’appartient pas, c’est ça ? Tu me demandes sans contrepartie de prendre ce pendentif runique qui te décore et dont tu n’as pu te revêtir seul. Pourquoi tant de générosité vis-à-vis d’un chevalier inconnu ?
Pour seule réponse, le sifflement de l’air qui s’échappe rapidement de naseaux dilatés se fit entendre et le taureau resta cependant immobile. Je demandai alors :
— Comment as-tu appris à parler ?
« Je ne parle pas, nos pensées se relient parce que la providence est mon crédo. Et tu ne m’es pas inconnu chevalier Ildarion Lancedor. La rumeur de ton arrivée s’est propagée dans les brises de la nuit, à travers le bruissement mélodieux des arbres, dans les échos enchantés que relaient les invisibles messagers du temps. »
Sa voix résonnait dans ma tête, puissante et grave, telle une séduction capable de m’hypnotiser et me soumettre. Je me tendis pour résister à la vague de certitudes que m'envoyait notre contact télépathique et vis que le taureau demeurait statique. Seuls ses yeux brillants d’un éclat revanchard suivaient mes gestes, alors que je me déplaçai précautionneusement face à lui. Il ne pouvait pas bouger et la vérité m’apparut telle une révélation lucide et froide.
— Et ces mêmes messagers qui chantonnent les humeurs de la nature me mettent en garde contre la facilité de ton offre, Taureau. Contrairement aux autres animaux qui paissent ici, tu ne te meus pas. La rune de terre te pétrifie.
Toute la bienveillance dans les pensées qui avaient constitué son discours d’accueil se dévoila alors pour ce qu’elle était, un stratagème destiné à endormir ma vigilance afin de se servir de moi. L’impressionnant animal resta inerte, mais son aura s’assombrit.
— Ne le provoque pas plus que nécessaire, intervint Lilo, qui revint vers moi d’un pas sautillant. Il ne peut effectivement plus ruer depuis des années, mais cela n’en fait pas un être sans défense. Il n’y a ni mousses ni parasites qui recouvrent ou rongent sa carcasse. Il est encore d’aspect vigoureux, sa magie le maintient à l’abri des affres de la putréfaction. Tu as bien fait d'être méfiant, Ildarion, mais as-tu compris pourquoi tu es ici ?
— Je ne suis pas là pour le libérer, mais pour apprendre à recréer la magie qui le statufie.
Lilo eut un sourire énigmatique qui plissa son étrange faciès.
— Les conseils avisés d’une vache sacrée te seront peut-être utiles, dit-il, une note mesquine dans la voix. |
| | | Blou
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Dim 5 Avr 2020 - 9:46 | |
| Sans m'en apercevoir, j'entamai la ritournelle : à l'ombre tremblante des sept noyers; Je commence, tu termines, tout ce que tu souhaites effeuiller, chaque fois, qu'en levant son vers d'origine, le lutin sifflera "le rire féé d'air" pour les écureuils fadas, lalalalère. Ce pré m'apparut encore plus gracieux qu'à l'arrivée et je m'en retournais auprès de la vache blanche gigantesque qui riait au bord du chemin. Une vache qui rit ! un sourire me fendit le visage et je m'allongeais auprès d'elle dans l'herbe fraîche et haute. |
| | | Poqueline
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Dim 5 Avr 2020 - 12:29 | |
| « Réfléchis petit homme , cette rune que tu serre dans ta menotte , tu l’as choisi avec ton coeur . Tu as failli te laisser entraîner par ta volonté et ton desir de puissance mais Neven est parvenu à te détourner de ta premier intention. Cette rune est l’objet qui te représente. Elle est un miroir de toi même. Grâce à elle, tu vas pouvoir apprendre à te connaître, à te faire confiance . Crois tu nécessaire de maintenant collectionner toutes les runes que tu rencontreras ? N’y vois-tu pas là le piège de la possession cachant une profonde peur de t’oublier à toi meme et de combler une sorte de vide, de panique intérieure, un manque d’assurance . Ce taureau est un leurre qui s’amuse de toi. Continue la route, t’attends chez lui le maître des mets. Tu dois avoir faim » me murmura avec sagesse la blanche ruminante. |
| | | SinceKid
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Dim 5 Avr 2020 - 23:17 | |
| Après ces péripéties, le temps est venu d'affronter un essaim d'abeilles fluorescent qui barrer le sentier des fleurs aux longues oreilles.
Lilo se mit à gesticulé en brandissant sa dague mirifique qui écarté les abeilles du passage où la voie les guidé.
Après ce simple périple Ildarion et son fidèle Altaïr marché de longue durée.
Arrivé au pied d'un arc en ciel en noir et blanc, un arlequin dénudé intercepta nos trois compagnons et se mit à bondir en balançant une canne en bois et les interpellas ainsi "Vous les rôdeurs de la nuit, s'avez vous qu'il est heure de goûter au charme de l'été" Ildarion de répondre "Mais est-ce toi qui nous guideras vers la faune et la flore estival de Ganymède?"
"Pour passé votre chemin il faudra résoudre une énigme" "La voici : quand tu lève ta main droite je lève ma main gauche, quand tu parle, moi en vain, qui suis-je?" Ildarion, après un moment de réflexion repondire "mon reflet dans un miroire" et l'arlequin laissa passé nos héros.. |
| | | Blou
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Lun 6 Avr 2020 - 22:03 | |
| un meuglement puis un claquement de queue avec quelque chose au bout pour chasser les mouches finit par me sortir de ma torpeur ! (une image vaut mille mots et une pensée vaut mille images). Hagard, je me plongeais à nouveau dans les longs cils recourbés de Dame la Vache - mère sans doute - car j'y vis tous les festins du monde. Enfin rassasié, elle me parla d'une voix tendre de mon sachet de graines.... de la terre ..... et de l'amour puis enfin de l'enseignement à venir . Sur ce, elle me chassa vertement en me désignant le chemin numéro 3
|
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 10 Avr 2020 - 15:01 | |
| Voyons voyons, je me grattais la tête perplexe en me demandant, mais de quel chemin elle parle...
_Bon, faisons confiance en Altaïr dis-je tout haut
Celui-ci tourna la tête vers moi, son front commençait à laisser voir un début de petite corne. Puis il commença à avancer, Lilo à ses côtés lui parlant à l'oreille.
Longtemps nous avons marché, traversant des landes fleuries, des prés d'herbes ondulant dans le vent, des collines escarpées ; enfin nous arrivions dans la clairière d'une forêt aux arbres espacés et rieurs, où coulait tranquille une petite rivière.
Quelques personnes aux habits bariolés étaient présentes et certaines avec des instruments de musique, l'une d'elle s'avança vers nous, une petite femme à la peau très brune, cheveux en longues tresses et les yeux d'un noir de jais.
En riant, elle souleva Lilo dans ses bras
_Bienvenue mon vieil ami ! dit-elle
_Quel bonheur de te retrouver Itza ! et il s'esclaffait de rire balancé dans l'air qu'il était, au-dessus de la tête d'Itza
L'ayant enfin posé au sol, Itza s'avança vers moi, les bras grands ouverts
_Bienvenue à toi aussi étranger, ainsi tu dois être ce chevalier que les esprits m'ont montré en rêve, et tu viens pour l'épreuve des quatre portes
_Mon nom est Ildarion, et je te remercie de m'accueillir... moi aussi j'ai de frêles souvenirs de ton visage, la nuit de pleine Lune dernière m'a procuré d'étranges songes.
Elle me prit dans ses bras, puis nous guida tous vers une sorte de hutte ronde recouverte de couvertures. A quelques mètres, on avait creusé un trou et allumé un grand feu. Au bord du trou, de grosses pierres de rivière étaient entassées semblant attendre sagemment , alors que quelques unes étaient déjà dans les braises du feu.
_Voici la hutte sacrée où ton passage des quatre portes va s'effectuer. Vois, le gardien du feu a commencé à allumer le feu, dans la hutte, nous allons tous ensemble retourner dans le ventre de la Terre Mère, accompagnés par l'eau, l'air et le feu. Là, dans le chaudron des éléments, tu vas nettoyer tout ce qui t'encombre à tous les niveaux de ton être. Tu traversera la porte physique, la porte émotionnelle, la porte mentale et la porte spirituelle.
C'est dans le ventre de la Terre ainsi nettoyé que tu pourras renaître.
_ Tout d'abord, nous devons tous nous dévêtir et mettre ces étoffes légères tissées spécialement pour la cérémonie.
Un vieil homme nous amenait un paquet de grandes écharpes blanches brodées de fleurs et d'animaux aux couleurs éclatantes.
Nous nous débarrassâmes de nos vêtements, remplacés par les étoffes enroulées autour de nos corps. Lilo eu droit à un joli foulard assorti à sa taille.
Itza commença à s'engager vers la hutte, ouvrit un pan de couverture qui laissa paraître une petite entrée très basse.
Nous étions plusieurs avec Lilo, au seuil de l'entrée. Déjà, le soir tombait et quelque étoiles s'allumaient.
_Viens, me dit Itza, avant d'entrer, tu t'agenouille, embrasse la Terre et déclare :"Pour moi, pour ma famille et pour toute la Terre"
Je m'agenouillais et prononçais les phrases à voix basse. J'entrais dans la hutte et m'assis. Je découvris un trou creusé au centre, puis un par un, chacun prit place dans le cercle et Itza entra à son tour, et rabattit la couverture sur l'entrée.
Nous étions dans une pénombre qui laissait juste deviner nos visages. Itza avait amené un grand récipient de terre dans lequel elle trempa un bouquet de plantes et vint asperger chacun du contenu du récipient. C'était un mélange fortement odorant, qui monta à ma tête, mais néanmoins calma la légère appréhension qui m'étreignait.
Elle commença à entonner un chant d'une voix claire et mélodieuse, dans une langue inconnue. La mélopée m'envahit, je fermais les yeux et assis là, peu à peu je sentis s'évanouir ma notion du temps.
Soudain, j'entendis Itza dire fortement : "Porte"
Le gardien du feu ouvrit l'entrée et déposa à l'aide d'une fourche, dans le trou au centre de la hutte, une première pierre incandescente. Puis une deuxième, puis une autre.
Aussitôt, Itza commença à asperger les pierres avec le mélange de son récipient. Au contact des pierres, où étaient-ce elles, un chuchotement, puis d'autres, la vapeur devient palpable, et une douce chaleur s'empara de la hutte.
Itza se remit à chanter, chacun se mit à chanter. Je repris ma ritournelle à pleine voix
A l'ombre tremblante des sept noyers, Je commence, tu termines, tout ce que tu souhaites effeuiller, chaque fois, qu'en levant son vers d'origine, le lutin sifflera "le rire fée d'air" pour les écureuils fadas, lalalalère
Mon corps commençait à transpirer, la chaleur intense de la vapeur semblait pénétrer toutes les pores de ma peau. Mes pensées vacillaient, mon ventre se dénouait, de vieux souvenirs de batailles revinrent, des blessures amères et des images cruelles. De plus en plus intense, la chaude vapeur traversait tout mon être, liquéfiant toutes les scories du passé.
Et ensemble, nous avons passé les quatre portes. Toutes les pierres ensemble se mêlaient au jeu de notre transformation, dans le ventre de la Terre Mère, de pierre, d'eau, de chants, de cris et de pleurs ; jusqu'au silence de nos âmes réunies en ce point qui touche à l'Infini.
Ce que chacun a trouvé appartient à son nouvel être, mais quand Itza donna le signal de fin et que nous sortîmes tous de la hutte, nos yeux étaient remplis de lumière, nos corps ne pesaient plus que le poids d'une plume et nos cœurs ouverts vibraient à l'unisson d'une confiance nouvelle.
Nous plongeâmes tous dans la rivière, l'eau glacée dans la nuit redensifiait nos corps et le froid vivifiant après l'extrême chaleur était une douceur sur la peau.
Je me séchais, et retrouvais mes habits, encore irradiant et transpercé par l'expérience, presque titubant je rejoignis mes compagnons déjà installés autour du feu.
La voute étoilée scintillait encore, le feu crépitait, au loin un oiseau de nuit cria, un musicien prit sa flûte et le son doux se mêla au chant du feu.
Assis, entre Lilo et Itza, je me sentais un homme neuf, débarrassé de tous mes vieux habits, un nouveau-né à l'inconnu...
Altaïr vint doucement déposer son museau sur mon épaule. Et dans mon cœur je l'entendis me parler.
_Ah mon cher Ildarion, maintenant toi aussi tu comprends le langage des êtres et des choses muettes. Celui de mon cœur à ton cœur, celui qui nous réunit tous dans le cœur du Grand Esprit.
Itza et Lilo se regardèrent et partirent d'un fou rire joyeux.
_ Oui, Ildarion, s'esclaffa Itza, désormais, plus aucun lutin ni écureuil n'aura de secrets pour toi, ni toi pour eux ! Je te promets même que tu pourras entendre les pâquerettes chanter en chœur avec le noyer, lalalalère !
Et tous les trois, Lili, Itza et Altaïr se mirent à chanter
A l'ombre tremblante des sept noyers, Je commence, tu termines,
Je me joignis à eux pour la suite de notre chanson
tout ce que tu souhaites effeuiller, chaque fois, qu'en levant son vers d'origine, le lutin sifflera "le rire fée d'air" pour les écureuils fadas, lalalalère
Les musiciens avaient tous sorti leurs instruments, la musique, sublime et envoûtante me berça et peu à peu je tombais dans le pays des rêves...
Seule une voix lointaine qui semblait gravée dans une mémoire incertaine et floue, me parlait d'un chemin numéro 3...
|
| | | Invité Invité
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Ven 10 Avr 2020 - 17:27 | |
| La troisième maison, m'étonnais-je... La troisième maison !? Je passais la main sur mon visage, secouais la tête pour tenter d'y remettre de l'ordre dans un geste qui me faisait presque sourire par l’hébétement qu'il traduisait. Nous avions marché des heures durant et juin avait disparu en un claquement de doigts. En un rien de temps. Je ne savais ni où, ni quand j'étais.
La maison trois, j'avais déjà résolu ses mystères... En préface du solstice d'été, un arlequin m'y avait reçu sous un arc qui cambrait le chapiteau céleste de sa ligne noire et blanche. J'avais joué à la devinette du double-je. J'y avais réfléchi avec une joie toute enfantine. S'était-il joué de moi, le bougre ? Étais-je resté prisonnier derrière le miroir de son énigme ? Avait-il pissé sur ma raison à un moment ou un autre ? Avais-je rêvé l'arlequin de juin dans ma hâte de progresser ? Un arlequin à poil, qui plus est. Et pourquoi la deuxième étape se rappelait à moi ? Pour me faire reculer ?
Pris d'un léger vertige, je ralentissais : _ Lilo, je crois que je perds la tête... _ C'est la meilleure chose qui pourrait t'arriver, ricana le vieux lutin qui avançait au devant près d'Altaïr. On t'entend réfléchir d'ici, tu parasites le chant des oiseaux. _ Je suis sérieux. Je perds la tête, m'agaçais-je. _ Je le suis aussi, rétorqua-il sèchement en se tournant vers moi, ses yeux clairs comme une lame de glace. Maintenant, avance ou tu vas finir plus raide que le taureau de la seconde étape.
Je n'insistai pas, cette perspective ne m'enchantant guère. 1, 2, 3, soufflais-je à moi-même... 4. Je vérifiais quand même discrètement sur mes doigts. L'hébétement. 1, 2, 3... Oui, quatre. C'était bien, ça. J'observais autour de moi. L'herbe était courte et parsemée de fleurs blanches éparses. La nature continuait son œuvre. L'été s'y était bien faufilé sur des jours qui s'étiraient afin d'offrir ses agréables premières moiteurs, le chaud parfum de ses fleurs, la chair juteuse et sucrée de ses fruits dans les vergers qu'il caressait. Lilo et Altaïr avançaient tranquillement au devant. Imperturbables. Le monde tournait rond. Il était. Pourtant, je restais perdu. Hors du temps, hors du présent, aspiré entre passé et futur sans pour autant cesser de me laisser porter par mes pas.
J'avançais dans cette étrange quête dans laquelle je m'étais jeté à corps perdu sans savoir ce que je cherchais. Sans réel plan. Jusque-là, cela m'avait plutôt réussi. C'était bien lorsque l'on ne cherchait plus que l'on trouvait. Avancer, encore et toujours, me rassurais-je... Prendre le droit de se planter. Avancer pour ne pas se faire devancer par la peur. La repousser. Chaque jour. Progresser sur un chemin qui compterait davantage que la destination. Se rappeler les épines mais aussi les temps et les champs à travers lesquels l'esprit s'était épanoui. Avancer. Surprendre les égarements, se surpasser pour illuminer l'insensé. Aller à cœur, en son cœur et découvrir ce qui y aurait poussé. Je plongeais ma main dans la poche pour me relier aux sagesses de la rune... Entre les nervures qui affleuraient sous ma peau, sa force tranquille me parvenait. Accomplissement et harmonie, inspirais-je. Avancer et distancer les doutes, expirais-je en faisant glisser mes doigts sur l'écorce des arbres qui m'accompagnaient, ici et maintenant. Renouer avec la nature, se relier à sa propre nature. Perdre la raison entre les mois de mai et juin pour se conter en saison nouvelle. Le temps pouvait bien s'arrêter. Avancer plus fort... Accomplissement et harmonie enracinés au corps. Garder foi en la magie qui dansait en soi. En l'évidence. Suivre la mélodie des frissons qui courraient sous la peau et déborder d'âme par les yeux. Se laisser guider par les murmures du vent qui soufflaient et déployaient les confidences de l'être en soi... Baisser les larmes de paix, de combat, en arroser la terre... Avancer sous les arbres qui se mettaient à exhaler un vert jade à l'éclat surnaturel. Se rendre à l'évidence... J'avançais. À n'en pas douter.
Lilo se tourna vers moi et m'adressa un clin d’œil encourageant. Nous avancions.
La nuit venait de tomber, une douce lumière en révélait les obliques, quand j'entraperçus un lac au détour d'un virage. C'était par là, je le sentais. Je repoussais la dentelle sauvage des quelques branches qui en dissimulaient la vue et l'endroit nous confia ses secrets. Sur un velours bleu nuit, une lune pleine était suspendue à quelques centimètres de la surface de l'eau et y coulait ses lumières argentées, orangées et rosées. L'onde en était recouverte. À croire qu'il y en avait sous l'onde aussi. Un peu plus au loin, on distinguait des formes étincelantes qui se balançaient en rythme sur une berge. Elles ourlaient d'un sillage pourpré le velours nocturne. Une clarté à la fois dense et fragile qui battait la mesure de ses entrelacs. Le spectacle était fascinant. Il m'appelait. Il venait me chercher. Il serait l'écrin de la pause dont j'avais besoin. Le refuge magique où je finirai de me ressourcer. Ces lumières vagabondes venaient me chercher. À n'en pas douter. _ Lilo, Altaïr ? Nous y sommes, affirmais-je avec un sourire confiant.
Mes compagnons opinèrent ensemble, un tel paysage ne pouvant faire que l’unanimité. De toute façon, ces deux-là étaient toujours d'accord...
Des enfants. Les lumières qui courbaient les ombres de la nuitée étaient des enfants. Un garçon et une fille qui faisaient de la balancelle un soir de pleine lune rose. À notre vue, ils cessèrent de jouer pour nous rejoindre, baignés de leur douce lumière et vêtus d'une tenue délicate. Leurs corps chétifs étaient en effet entièrement recouverts d'un camaïeu de fleurs violettes maintenues par un ingénieux système de feuillages. Une bulle de verre entourait leurs visages poupons. Ils la retirèrent quand ils nous aperçurent et se mirent à accélérer le pas. Des ombres étincelantes qui perçaient le crépuscule.
_ Bonsoir les enfants. Je m'appelle Ildarion, chevalier de Lancedor. Je vous présente Altaïr, mon cheval, et Lilo du Boisjoli... Je n'avais pas terminé ma phrase que les enfants s'illuminèrent en chœur avant d'atterrir dans les bras du bon vieux Lilo... "Que vous devez certainement connaître puisque tout le monde se connaît ici... Évidemment.", levais-je les yeux au ciel, de nouveau hébété.
_ Mes chéris, quel bonheur de vous voir, vous allez bien ? Ohlala, vous avez encore grandi. Mais, dis-donc, vous me dépassez !? Ça devait bien arriver un jour, se moqua de lui-même le vieil homme dans le cou des enfants. _ Grandir pour toucher la lune, s'exclamèrent d'une seule voix les bambins. _ Waa, ce n'est pas un cheval, c'est une licorne, remarqua la petite fille, aussitôt suivie par le garçon. Ils recouvraient de caresses, de tendres baisers un Altaïr qui se laissait cajoler de bon cœur. Dans cette histoire, mon fidèle compagnon avait vraiment tout gagné. _ Il s’appelle comment, me demanda le garçon sans me regarder, mais enfin conscient de ma présence. _ Altaïr. _ Ça te va drôlement bien, tu sais, chuchota la petite à son oreille.
Il y avait quelque chose de désarmant chez ces enfants. Une grâce troublante, discrète, mais puissante les auréolait. Peut-être était-ce dû aux milliers de petites tâches solaires qui constellaient leur visage ? Peut-être était-ce l'innocence de l'enfance, sa pureté, tout simplement ? Lilo les observait fièrement, les yeux injectés d'étoiles. D'amour.
La petite délaissa l'animal et revint vers moi dans une allure timide : _ Un joli soir sur toi, Ildarion. Je m'appelle Lunaé. Et lui, dit-elle un hochement de tête en direction du garçon qui était resté à choyer le cheval, c'est mon frère Léni. _ Enchanté de te rencontrer, belle enfant.
Lunaé se cala dans les bras rabougris du gnome qui ne semblaient être faits que pour l'y recevoir et continua : _ Tu dois certainement te demander ce que font des enfants dehors à pareille heure de la nuit... _ Oh, ma beauté, si tu savais tout ce qu'il se demande à la minute, gloussa le lutin en passant une main affectueuse dans les cheveux de l'enfant. Hmm, deux fois que le gnome se payait gentiment ma tête en quelques heures. _ Ha ha, très drôle, Lilo... Mais oui, je reconnais que je suis curieux de vous. Si mon intuition m'a amené jusqu'ici, c'est que j'ai certainement quelque chose à apprendre. _ On a toujours quelque chose à apprendre, Ildarion chevalier de Lancedor, dès lors que l'on s'abandonne à l’émerveillement qui sommeille en soi. Asseyons-nous ici, nous enjoignit Lunaé de sa voix fluette.
Nous la suivions et nous nous posions au bord du lac. Une nuée de moustiques voletait à sa surface ondulante, moirée de rose et d'argent. L'air était chargé d'une remarquable suavité. Sous l'œil de l'astre lunaire, Lunaé me raconta : _ On nous appelle les Enfants de la Lune car notre sensibilité à fleur de peau nous empêche de sortir le jour au risque que le Soleil ne nous embrase de ses rayons extraviolets. Les tâches qui émaillent nos visages et nos corps sont autant de baisers flamboyants qu'il nous a adressés. Mais s'y écrient aussi les flots de sensibilité que nous avons en réserve. Nous avons parfois tant de difficultés à l'extérioriser qu'elle s'échappe, éclate et bourgeonne en ces petites traces solaires, anarchiques et indélébiles, confia-t-elle en posant sa tête sur l'épaule du gnome.
Ses mots se déposèrent dans le silence de la nuit et ricochèrent en mon cœur touché à mesure que je saisissais ce que les entre-lignes contenaient. Je finis par briser le silence qui nous enveloppait : _ Vous ne sortez donc jamais à la lumière du jour ? _ Oh si, mais jamais, ô grand jamais, sans nous badigeonner de lotion féerique, de notre carapace de verre bien vissée sur nos têtes et cette tenue anti-extraviolet qui a transformé nos vies ! Elle nous protège des rayons extraviolets. Les fleurs qui la composent étaient d'une blancheur immaculée lorsque l'on nous les a offerts. En absorbant les rayons extra-violets du Soleil, elles se sont parées de ces délicates teintes de parme, pourpre, rose, bleu, violet, mauve, magenta... C'est Cléophée et mon bon vieux Lilo qui les ont conçues spécialement pour nous. Ça et les rideaux de fleurs qui protègent les fenêtres chez nous. Ravissant, n'est-ce pas...? _ Un euphémisme, jeune fille. _ Et ce sont nos imaginations réunies, leur puissance illimitée qui en sont à l'origine... Le bon sens et quelques savoirs ancestraux ont bien-sûr fait le reste, ajouta-t-elle dans un sourire complice au vieux lutin. C'est ainsi habillé que nous veillons aux rêves des enfants, des hommes du monde, de tous les êtres vivants avec l'amour d'une mère et l'innocence de notre enfance... Les rêves, l'imagination, les envies qui les façonnent, les espoirs qui s'ébattent dans leur univers sensible et peu importe le monde ou la réalité dans lesquels ils évoluent. Nous veillons à ce que les enfants restent des enfants. À ceux qui perdent leur innocence trop vite, nous veillons à ce qu'ils créent du sens. Nous veillons à ce que les adultes ne s'éloignent jamais de leur âme d'enfant. Elle est à la source de toute chose. De toute magie. Et je crois savoir que tu as plongé dans ses mystères... _ On ne peut rien te cacher, demoiselle... J'ai fui mes semblables pour mieux communiquais avec les spectres autochtones en des temps de chrysalide virale. Le monde était sous cloche. D'un tour à un autre, d'une rencontre à une autre, la flamme perdue m'est revenue et la magie s'est instillée doucement dans mes veines. Cette quête m'a mené jusqu'à toi.
_ Ce sont tes rêves qui t'ont mené jusqu'à toi. Ils t'observent constamment, honore-les, enchaîna Léni qui venait de nous rejoindre. Ma sœur et moi sommes les canaux de réception. Un maillon dans la chaîne de ton monde intérieur. Des passeurs de rêve. À chaque soir de pleine lune, juste avant que le soleil ne tire sa révérence, et gorgés des couleurs du jour, nous venons ici pour relier rêve et réalité, ciel et terre, jour et nuit. Après avoir recueilli les confidences lunaires, nous y envoyons quelques-unes des émotions, les inspirations, les nuances subtiles qui donnent du corps à une vie. Du relief. La lune les dispersera dans les rêves nocturnes tandis que le soleil s'occupera à faire pousser des extra dans l'ordinaire des jours. L'imagination est une voie royale pour enchanter le réel. Pour le changer, le recréer. Elle est vivante. Spontanée. Elle permet de s'échapper simplement, comme elle peut devenir matière vivante. D'un rien peut éclore un tout. Cette robe et ce casque en sont une des fabuleuses expressions. Les grandes découvertes découlent souvent d'esprits aussi inventifs qu'imaginatifs. Dans sa fertilité, l'imagination permet de repousser les frontières de la connaissance, à en entrevoir de nouvelles. Infiniment plus grandes. Elle réclame une sacrée force, presque extrahumaine, quand il est plus facile de se laisser séduire par le chant du cynisme.
J'écoutais attentivement les enfants, je sirotais leurs paroles, m'en abreuvais... Chacun de leurs mots éclataient en moi en petites bulles d'oxygène. Ils me rassérénaient. Près d'eux, je me sentais au plus près de moi. Chez moi. À la maison. _ Et oui, sens-tu l'espace qui se crée sur ces mots, cette belle promesse à-venir ?, continua Lunaé qui avait perçu le frémissement. C'est l'éveil à ton propre Soleil qui continue de se manifester au dedans. Il n'y aura pas d'épreuve ici, Ildarion... _ Pas d'épreuve !? _ Aucune. Pas de tour, pas de défi... Si ce n'est celui de ne jamais oublier ce que l'on s'est confié cette nuit. Prends soin de cette sensibilité, écoute-la. Elle est magie véritable. Une des clés essentielles pour ouvrir la porte de la cinquième étape et avancer sur le chemin qui est le tien. T'y trouver, t'y retrouver toujours un peu plus. _ Je n'oublierai rien de cette nuit éclairante, les enfants. Je garde précieusement tous vos mots, vos êtres. _ Nous devons rentrer. Mais avant, reçois cette fleur en souvenir de notre rencontre. Elle la symbolisera, sourit Lunaé en me tendant une fleur qu'elle avait cueillie sur sa robe. _ Votre délicatesse me touche, belle enfant. J'accueille votre présent avec plaisir.
Je les regardai s'enfoncer dans la nuit, encore empli de leur douceur : _ Lilo ? Quel âge ont ces enfants ? _ Mille vies. À peu près. _ Mais alors, toi, ça te fait quel âge ? _ 5 ans, éclata de rire le bon vieux guide.
Je me couchai cette nuit-là le sourire à l'âme et des rêves plein la tête. J'aurais aimé que ce temps ne s'arrête jamais. Non, que dis-je, il ne s'arrêterait jamais puisqu'il vibrait et vibrerait longtemps en moi. À tout jamais. |
| | | cheliel
| Sujet: Re: Le cadavre exquis Lun 20 Avr 2020 - 3:00 | |
| Tout disparaît subitement. Il fait noir. L’impression de suffoquer inscrite au fer rouge dans des sensations engourdies d’ailleurs. Suis-je conscient ou n’étais-je que l’éphémère reflet d’une pensée, miroitant sur le lac sombre de l’infini ? « Je », qui est-ce ? Le malaise partout, l’angoisse de ne rien comprendre, la peur de n’être qu’une idée abstraite jetée par hasard, dans le néant illusoire d’un reste qui se délite à perte de tout.
Puis, un point blanc qui irradie au loin. Rien n’est proche, mais cette lumière qui brille faiblement donne naissance à un espace, un nouvel horizon qui se dessine timidement dans l’absence, pour la combler de quelque chose qui lui échappe. L’ensemble étrange et impalpable qui construit les connexions du probable me caractérisant bizarrement s’approche de la source lumineuse. Il n’est pas dit que ce ne soit pas elle qui bouge et se tend vers l’entité que je deviens à mesure que l’éclairage façonne une nouvelle situation.
Je ressens. Entre peur et exaltation je me recrée dans cette lumière qui finit par me nimber. Et il y a cette douce tiédeur qui me caresse l’âme pour y diffuser une paix magistrale. Je n’ai pas besoin de chercher à comprendre. L’évidence ne compose aucune question lorsqu’elle touche à l’essentiel. Il y a d’autres présences. Elles stimulent les ondes réconfortantes de l’univers qui m’absorbe et me confond en son sein. Je suis de retour et la joie règne paisiblement en ce berceau de clarté.
Les murmures naissent tendrement, telles des bulles de secrets pétillant sur la partition de l’espoir partagé. Touche après touche, ils se muent en une mélodie de mots qui peignent et dépeignent l’amour, l’impriment en mes rythmes oubliés. Tout s’accorde harmonieusement aux paradoxes. L’entièreté vibre d’une musique primordiale et mystique. Je me sens nouveau, connu, compris, découvert et ancien. Je me sens porté, transporté, déporté par les courants tempérés qui me charrient en tous lieux. Je suis ici et étais là-bas, il, elle et toi.
On me réconforte, on m’inonde d’amour, de bienveillance et je comprends pourtant que je suis en avance. Il n’est pas encore ce temps où j’accueillerais à mon tour, l’aura d’un autre retour aux sources infinies de la renaissance. Je suis en avance et j’entends d’autres appels, provenant d’un présent qui m’attend alors que j’en déni l’écoulement. Je ne peux encore m’accorder aux symphonies brumeuses d’un au-delà de merveilles, alors même que mes propres ombres m’échappent, telle une amnésie qu’il me faut défaire pour pouvoir saluer d’expériences, mes adieux à la vie.
Boum. L’univers vibre dans un tambour souvenir. Boum boum. Aspirations, monde physique, rêve d’amour et flot cosmique. Boum. Allongé dans un lit, mon corps affaibli. Boum boum. Tuyaux, machines, mécaniques et bips sonores en déclics. Boum. Je suis en vie, ici et demain, double témoin des dimensions en sursis. Boum boum, j’ai connu la magie, mais cette nouvelle épreuve me terrifie.
Soudain, je me sens contraint, dans un corps restreint. La douleur me démange l’âme et j’ose espérer lui échapper alors que je m’éveille à sa tyrannie. L’ankylose est l’oppression qui joue sur mes perceptions. Rien ne va. Je sens la contrainte de la vie qu’on impose à mon être, la gêne que les tubes étrangers retracent en mon intime. Je ne parviens pas à ouvrir les yeux. La lourdeur de mon corps me piège dans l’épreuve de la guérison. Les odeurs et les goûts me transpercent les sens, m’invitent au dégoût, tandis que les sons environnants s’affolent de singer mon emballement organique.
J’ai peur et je comprends soudain. Je viens de sortir du coma. À cette pensée mes yeux s’ouvrent subitement et s’écarquillent. Je panique et tout s’accélère autour de moi. Une infirmière apparaît. Un autre la suit. Mon être est en crise de reprendre conscience, or il ne sait rien des raisons qui l’entraînent à survivre. La terreur s’infiltre, ravivant chaque réseau de souffrance assommée de soulagement, pour leur redonner la vigueur d’un supplice qui n’avait jamais cessé. Tout retombe subitement, et je m’oublie.
J’arrive à ouvrir les yeux. Il fait noir et les machines sont calmes. J’ai envie de reprendre conscience, mais la fatigue est trop forte. Nouvelle absence.
La voix d’une femme. Les larmes en lissent les rigueurs et imbibent de désespoir les rêves d’avant.
— Ils disent que c’est un miracle si tu t’en es sorti. Je ne sais pas ce que je ressens. Quelle vie nous attend ? Un chevalier du feu dévoré par les flammes… Vas-tu t’en remettre ou souffrir à jamais pour finalement aspirer avec toi dans les limbes, ta caissière BAC plus cinq travaillant à mi-temps pour une bouchée de pain ? Elle est belle ta déesse, avec ses questions à deux balles, hein ?
Le cynisme redessine ses contours un instant, mais elle se laisse de nouveau choir dans les sanglots. Je ne la vois pas bien. Elle est floue dans la lumière qui s’offre à mes prunelles timidement dévoilées. Sa silhouette est ratatinée dans un siège, elle paraît poser ses paumes sur ses yeux. Mon corps est une ode au calvaire, rien ne peut y échapper, chaque parcelle de ma chair recèle sa part de supplice. La voix de ma voisine refait surface dans les tremblements que l’incertain lui inspire.
— Mon David, si fier, si vif…
Nouvelle vague de tristesse s’imposant dans l’humeur de l’instant et je n’ai que mal d’exister. Pourquoi suis-je ici ? J’étais avec Lilo et Altair. Je venais de rencontrer tant de nouvelles âmes. Cléophée, Neven, Itza, Lunaé et son frère Léni… Pourquoi m’appelle-t-elle David, cette inconnue qui pleure à mon chevet en ignorant que je suis Ildarion, l’homme qui revient à lui ? Tout devient de nouveau insupportable d'alarmes. Je m'effondre dans la défaillance. |
| | | Contenu sponsorisé
| Sujet: Re: Le cadavre exquis
| |
| |
| | | |
Page 2 sur 2 | Aller à la page : 1, 2 | | |
| Permission de ce forum: | Vous ne pouvez pas répondre aux sujets dans ce forum
| |
|
| |